
1892
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8 février 1892
ASSASSINAT l'affaire de la Tour du commerce
Les habitants des principales places de la ville sont réveillés chaque nuit par la foule des gens qui attendent l'exécution de David, l'assassin des femmes Péault et Malenfant, et le bruit doit arriver certainement jusqu'au condamné.
David qui avait cyniquement déclaré qu'il ferait l'affaire du curé qui viendrait lui offrir les consolations de la religion est revenu à de meilleurs sentiments. Il a fait, avant hier, sa première communion.
La Cour de cassation ayant rejeté son pourvoi, son avocat, M Catta, est venu hier lui faire signer son recours en grâce.
22 février 1892
le bourreau Deibler devant sa guillotine
ASSASSINAT l'affaire de la Tour du commerce
L'exécution de David, l'assassin des femmes Péault et Malenfant, est imminente. Le condamné, bien qu'il s'attende au rejet de son pourvoi, n'a pas perdu son cynisme habituel.
Il a écrit à Deibler une lettre dont j'extrais ce passage :
« N'ayant pas de travail en ce moment, je serais heureux d'être embauché dans votre équipe de scieurs de long.»
Il termine ce badinage sinistre en priant l'exécuteur des hautes œuvres de transmettre à ses aides les amitiés du condamné à mort.
Voici, d'autre part, l'épitaphe par laquelle David couronne sa carrière :
Ci-gît l'ami le plus fidèle;
Un crime causa son trépas,
Il égorgea deux bonnes vieilles.
Passants, ne l'imitez pas!
Ce joli gredin n'a que vingt ans !
22 mars 1892
ASSASSINAT l'affaire de la Tour du commerce
exécution capitale
Saint-Nazaire, 21 mars.
Le nommé David, condamné à mort par la Cour d'assises de la Loire-Inférieure pour avoir assassiné deux vieilles femmes, a été exécuté ce matin.
Il attendait depuis 87 jours la décision présidentielle et pendant tout ce temps il avait fait preuve d'un calme étonnant.
Dès deux heures du matin, une demi-compagnie d'infanterie arrive place Marceau ou doit avoir lieu l'exécution, et à trois heures la gendarmerie forme le cercle et repousse à grand peine la foule déjà très considérable. Un grand nombre de dames s'étaient même commodément installées sur des chaises. A trois heures et demie Deibler et ses aides procèdent au montage des bois de justice. Cette opération faite, ils se rendent à la prison où se trouvent le procureur de la République et d'autres magistrats.
Le gardien-chef réveille David et on lui annonce que l'heure de l'expiation est arrivée.
« C'est bien fait, dit-il, je l'ai mérité. »
Il prend du café et du rhum et entend la messe. Conduit au greffe où l'on procède à la toilette, David demande la permission d'adresser quelques mots à la foule. Vêtu d'un pantalon et d'une chemise, il monte en voiture en compagnie d'un aide et de l'aumônier; son attitude est calme et on sent qu'il ne faiblira pas.
Le fourgon précédé et suivi de gendarmes arrive à six heures place Marceau et vient se ranger à gauche de la guillotine.
On fait descendre David.
A ce moment la foule pousse des cris et essaie d'approcher du condamné. Mais apprenant que David veut parler, elle se tait et le condamné prononce à haute voix les paroles suivantes
« L'heure de la justice a sonné pour moi; croyez-moi, mes amis, j'ai mérité le châtiment supérieur et je l'accepte comme une expiation légitime des crimes que j'ai commis. Laissez-moi vous dire avant de mourir, ô vous qui au fond du cœur me maudissez peut-être. Prenez garde aux mauvaises compagnies comme celles qui m'ont perdu respectez la religion qui seule peut éclairer l'homme dans le chemin de la vérité. Dieu que j'aime et que j'ai connu si tard me donne la grâce et la consolation de mourir en chrétien. Je l'ai remercié, il a pardonné au voleur et à l'assassin David; en son nom, veuillez me pardonner.
Merci à M. l'aumônier de la prison de Saint-Nazaire, ainsi qu'à M. l'aumônier de la prison de Nantes, à ces deux honorables prêtres à qui je dois mon salut éternel. Je vous donne rendez-vous au Ciel. Au revoir, mes amis Maintenant, en avant et vive la France »
Cette adjuration à peine terminée, un aide du bourreau fait avancer David. D'un pas ferme il marche vers la guillotine qu'il examine curieusement. Arrivé au pied, il se couche lui-même sur la bascule et en une seconde tout est fini.
Suivant le désir exprimé par le condamné, son confesseur a accompagné le cadavre au cimetière où l'inhumation a eu lieu immédiatement.
La mère de David avait déclaré qu'elle assisterait à l'exécution de son fils. Mais comme elle est presque toujours ivre, on a craint un scandale et on l'avait arrêtée il y a deux jours.
G. P.
22 mars 1892
ASSASSINAT l'affaire de la Tour du commerce
LA GUILLOTINE A SAINT-NAZAIRE
L'assassin David. - Deux; épitaphes, Devant la guillotine. - L'exécution
Hier matin, cinq mille personnes étaient réunies sur la place Marceau, à Saint-Nazaire, pour assister à l'exécution de l'assassin David. C'était la première fois que la machine de M. de Paris fonctionnait dans cette ville.
Le condamné David (Emile), Agé de vingt et un ans, pendant la nuit du 2 au 3 mars 1891, en compagnie de deux gredins comme lui, Cabel, âgé de dix-sept ans, et Forget, Agé de vingt-quatre ans, assassina, pour les voler, deux vieilles femmes, la veuve ! Péault, âgée de soixante-trois ans, et la femme Malenfant, sa soeur cadette.
Tandis que Forget faisait le guet dans le jardin, David et Cabel s'introduisaient par la lucarne d'un petit cellier, dans la chambre où dormaient les deux soeurs et les assassinaient.
Le butin fut maigre. Après avoir boule- versé toute la maison, les assassins ne purent s'emparer que d'une somme de 3 fr, le tout ce que possédait la malheureuse veuve Péault !
Forget et David furent condamnés à mort par la cour d'assises de la Loire-Inférieure. Le premier a dépisté toutes les recherches. Durant les trois mois que David a attendu le rasoir national, il a fait preuve d'une grande liberté d'esprit. Il avait, sans doute d'après les conseils d'un aumônier, composé plusieurs discours d'une piété très édifiante qu'il devait prononcer avant de se pencher sous le couperet.
Poëte
David a commis beaucoup de vers durant sa détention,
A citer de lui deux épitaphes, l'une pour ses victimes, l'autre destinée à sa propre tombe :
ÉPITAPHE POUR LES DEUX VICTIMES
Passants regarder ces deux pauvres vieilles
Qui repose aujourd'hui dans leurs triste tombeau ;
Pleurez et gémissez de leurs mort si cruelle,
Priez un peu pour la veuve Péaut,
Priez aussi pour cette mère charitable
Qui consacra toute sa vie a aimé ces enfants ;
Pitié pour elle, pour cette mère honorable,!
Priez chrétien pour la femme Malenfant.
ÉPITAPHE D'UN CONDAMNÉ A MORT
Ci-git L'ami le pins fidéle,
Le crime seul causa son trépas,
Passants plaignez ce criminelle,
Priez quelque fois pour ce scélérat
Arrêtez-vous un peu devant ce coupable
Qui repose en ces lieux, auprès de ce chemin,
Je lus un mal lieux, mais j'était votre semblable
Quoique j'ai étais un terrible assassin,
Je prie Dieu aujourd'hui pour ces deux pauvres dames
Que moi et Cabel nous avons lardé sans pitié,
J implore les fidèles de priez pour ces âmes
Qui maintenant repose auprès do l'éternité.
L'exécution
A cinq heures du matin, le directeur de la prison, le procureur de la République, l'aumônier, et presque toutes les autorités de Saint-Nazaire pénétrèrent dans la cellule de David.
Le condamné à mort s'éveilla et s'habilla pendant que le procureur donnait lecture du rejet de son recours en grâce. « C'est bien, dit David, je l'ai mérité. Je serai courageux.
Il but une tasse de cale avec du cognac, se confessa et assista à une messe qui dura treize minutes. Il serra la main à ses gardiens avant de quitter sa cellule, et voulut fumer une cigarette avant de se confier aux bons soins du bourreau. Pendant la toilette, il but un second verre de cognac et de- manda à M. Deibler l'autorisation de parler avant de mourir. Cette autorisation lui fut accordée. Il monta en voiture à six heures, un peu pâle, et arriva peu après place Marceau.
Devant l'échafaud, le dos tourné au rasoir, David prononça d'une voix assez élevée le discours suivant :
Aux habitants de Saint-Nazaire,
Je demande pardon à Dieu et aux Hommes, des crimes que j'ai commis. J'ai mérité la peine que je subis, et je ne m'en plain pas. Je tien ce- pendant k VOUS dire, que je meurs en chrétien, je remets mon âme entre les mains du dieu qui m'a créé, qui m'a racheté au prix de son sang, du dieu qui a pardonné sur la croix, à un vo- leur et un assassin comme moi. Je livre mon corps aujourd'hui au bourreau, pour payer à la France, ma Patrie, la dette que je lui doit. Puisse mon exemple servir et sauver d'autres malheureux égarée. C'est ce que je demande à Dieu ! Au revoir, mes amis, au ciel ! Vive notre seigneur Jésus-Christ ! Et vive la France !
Son discours achevé, il s'allongea sur la bascule et le couperet tomba.
23 mars 1892
ASSASSINAT l'affaire de la Tour du commerce.
LettreS D'Un Condamné à Mort
Le vénérable aumônier des prisons de Nantes, M. l'abbé A. Patron, nous communique, selon les instructions qui lui ont été données par le condamné lui-même, quelques lettres de David qui a été exécuté avant-hier, dans la Loire-Inférieure.
On sait que David avait tué deux malheureuses femmes.
Voici d'abord la lettre d'envoi de l'aumônier
Nantes, le 22 mars 1892.
Monsieur le Rédacteur en chef,
Au lendemain du jour où un grand acte de justice humaine vient de s'accomplir à Saint-Nazaire, permettez-moi de venir demander à votre estimable journal de vouloir bien porter à la connaissance du public, si légitimement révolté en face de forfaits dignes de l'expiation suprême, les pensées et les sentiments du condamné David.
Aujourd'hui qu'il a payé de sa tête, et payé à bon droit, il va vous le dire lui-même avec une émouvante énergie, n'est-il pas juste de lui tenir compte de son repentir, d'un châtiment si courageusement accepté, tout épouvantable qu'il fût.
Sans instruction on peut dire, sans éducation aucune, sans ombre de principes religieux, sans nul frein, en un mot, David, enrôlé pour toutes les aventures Malsaines, pour tous les crimes au besoin, étale à la Tour du Commerce tout le cynisme de l'assassin le plus sanguinaire et le plus éhonté. Jusqu'au jour du jugement, à côté de la salle des Assises, il affectera, avec la bande des misérables accusés comme lui, toutes les fanfaronnades du crime et de l'impiété, au point de révolter les honorables agents de la force publique qui les entourent.
David est condamné à mort le 23 décembre dernier, il va nous révéler ce qui se passe en lui à partir du jour où, à la prison de Nantes, il est invité par le prêtre à rentrer en lui même pour se repentir dignement.
le 5 février, à la prison de Saint-Nazairẽ: il est déjà transféré, David, sommairement instruit des vérités religieuses, fait sa première communion dans une attitude de foi et de résignation chrétienne qui arrache des larmes aux quelques personnes qui l'assistent. Sous les chaines qu'il porte, son calme et son entière soumission ne se démentiront pas un instant, il voudrait que le terrible/spectacle d'un malheureux, tombant sur l'échafaud pour ses crimes, en se repentant, fût d'un salutaire exemple et un objet d'épouvante pour les malfaiteurs et les assassins. Ce désir, souvent exprimé par David, il me l'a réitéré dans une dernière lettre, en date du 17 février. Je vous la livre (textuellement copiée), monsieur le Directeur, comme celles qui l'avaient précédée, afin de respecter les dernières volontés d'un grand coupable, qui voudrait expier autant qu'il est en lui. La parole de David prouver une fois de plus les lugubres désastres où aboutit l'existence sans principes et sans Dieu.
Veuillez agréer, Monsieur, l'expression de mes sentiments bien respectueux.
A. PATRON,
Aumônier des prisons de Nantes.
Voici maintenant les lettres du condamné à mort
Nantes, maison d'arrêt, 1er janvier 92.
Monsieur l'aumônier,
Je vous écris ces quelques lignés pour tous souhaiter une bonne et heureuse année, ainsi que le paradis à la fin de vos jours.
Monsieur, je vous remercie infiniment de m'avoir donné ce livre, car depuis que j'ai commencé à le lire, je me trouve bien plus tranquille que je ne l'étais au commencement de ma condamnation. Monsieur, vous direz peut-être que j'ai tort de vous dire cela; mais, Monsieur, si je me permets de vous le dire, c'est pour rendre service à la société. Voici ce que je veux vous dire: je vous prierais, Monsieur, si c'était un effet de votre bonté, de vouloir bien conter mon histoire à tous les jeunes garçons pour leur donner à réfléchir. Dites leur que je n'ai commis aucun crime jusqu'à d l'âge de vingt, ans.
Et un jour, étant entraîné par un malfaiteur, je me suis mis à voler avec lui, et un mois après j'étais assassin.
Dites-leur que c'est la voie la plus glissante de toutes. Dites-leur de la part d'un condamné à mort de ne jamais se mettre à voler, car du larcin on va au vol simple, du vol simple au vol qualifié et, qu'un témoin apparaisse. on devient assassin. Dites-leur tout cela de ma part, et s'ils ne veulent pas vous croire, faites leur voir ma lettre dites-leur qu'il n'y a tel de vivre sans travail, car l'argent volé ne profite jamais; dites-leur aussi de se méfier surtout des individus qui les inviteront à boire avec eux, car ces individus vous en veulent et désirent vous entraîner avec eux pour commettre des vols; car une fois sous l'influence do la boisson, on ne se connaît plus. Enfin, contez-leur toute mon histoire, de manière à les faire réfléchir à leur position, ainsi qu'à Dieu, le Sauveur du monde.
Monsieur, dites-leur que depuis que vous et mon cher avocat m'avez parlé du bon Dieu, je me trouve très heureux; dites-leur que per- sonne ne m'avait jamais parlé du bon Dieu, que vous, le jour où vous êtes venu me voir ainsi que mon avocat.
Rien autre chose à vous dire pour le moment.
Signé Emile David.
Cela pourrait être dédié aux partisans de l'éducation antireligieuse.
Autres lettres
Saint-Nazaire, le 27 janvier 1892.
A Monsieur Patron,
Monsieur,
Je vous écris ces quelques mots pour vous dire que je suis en très bonne santé, et je désire que ma présente lettre vous trouve de même.
Monsieur, je croyais que vous seriez venu lundi; vous m'excuserez si je me permets de vous dire cela, car, Monsieur, j'ai hâte de me faire confesser; je voudrais vous voir tous les jours, Monsieur, pour vous entendre parler de Dieu davantage, car je vous dirai, Monsieur, que si l'on m'avait parlé de Dieu dans ma jeunesse, je ne serais pas où je suis au jour d'aujourd'hui mais malheureusement personne ne m'en a jamais parlé, voilà pourquoi je suis tombé dans cet abîme. Je vous dirai, Monsieur, que je ne regrette pas, d'une manière, d'être condamné à mort, car si j'avais été •condamné aux travaux, je serais devenu pire que je ne l'ai été. Monsieur, je vous espère avec impatience, car il me tarde de vous voir. Veuillez agréer mes meilleurs sentiments.
Signé Emile David.
Saint-Nazaire, le 17 février 1892.
A monsieur Patron,
Monsieur l'Aumônier, je ne saurais assez vous remercier -du bonheur que vous m'avez procuré en me faisant faire ma première communion. Depuis, je me sens plus fort pour me soumettre à la volonté de Dieu et accepter mon châtiment. Je vous ai écrit plusieurs lettres, si vous le jugez convenable, je vous prie, monsieur l'Aumônier, de les faire connaître aux .autres elles feront peut-être du bien après tout le mal que j'ai fait.
Je voudrais bien pouvoir le réparer.
Merci encore de m'avoir fait connaître le .bon Dieu, c'est depuis ce moment-là, Monsieur, que je suis plus fort.
Je vous serre affectueusement la main.
Signé Emile-Louis DAVID.
La dernière est datée du 20 mars, veille de l'exécution
Monsieur l'Aumônier,
J'ai encore quelques mots à vous dire à propos de mon exécution que j'espère avec impatience
Aux habitants de Saint-Nazaire,
Mes chers amis,
Je demande humblement pardon à Dieu et aux hommes des crimes que j'ai commis. J'ai mérité le terrible châtiment que je vais subir. tout à l'heure et je ne m'en plains pas. Je tiens cependant à vous dire que je meurs en vrai chrétien.
Je remets mon âme entre les mains du Dieu qui m'a créé, qui m'a racheté au prix de son sang; du Dieu qui a pardonné sur la croix à un voleur et un assassin comme moi. Je livre mon corps aujourd'hui au bourreau pour payer à la France ma patrie la dette que je lui dois. Puisse mon exemple servir à sauver d'autres malheureux égarés
C'est ce que je demande à Dieu.
Au revoir mes amis, au Ciel.
Vive Notre Seigneur Jésus-Christ, Vive la France !» »
Voilà ce que je vais réciter.
Je finis en vous embrassant de tout mon cœur.
Signé Emile David.
Ce sont en effet ces paroles textuelles que David a prononcées avant-hier matin au pied de l'échafaud, ainsi qu'en atteste le vénérable aumônier.
25 mai 1892
ANARCHISTE
SAINT-NAZAIRE, 24 mai. - Le procureur de la République vient d'ordonner une perquisition au domicile du sieur Guillemin, manœuvre à Penhouët, correspondant du "Père Peinard", bien connu pour ses opinions anarchistes. Beaucoup de papiers compromettants ont été saisis. Guillemin qui, au cours de la dernière période électorale, distribuait et affichait des proclamations révolutionnaires, va sans doute être arrêté.
Des perquisitions vont également être faites chez un dépositaire de journaux et chez les frères Broussard, domiciliés rue Craon.
Ceux-ci seraient gravement compromis.
12 juillet 1892
SAINT-NAZAIRE, 12 juillet. - A la suite de la décision des Chambres syndicales de ne pas assister à la fête du 14 juillet, les conseillers municipaux socialistes, réunis hier soir, refusent également d'y paraître. Notification sera adressé ce matin au maire.
27 juillet 1892
J'ai reproduit, avant le 14 juillet, la lettre des syndicats ouvriers de Saint- Nazaire, refusant de prendre part à la fête populaire, bonne au plus pour « la bourgeoisie »,
Ces protestataires comprendraient-ils, dit le Temps, le ridicule et l'injustice de l'attitude qu'ils eurent il y a quinze jours ? Toujours est-il que le secrétaire de la Bourse du travail, le même qui avait signé la fameuse lettre dont nous venons de parler a fait amende honorable.
Il écrit ceci au sous-préfet de Saint-Nazaire :
« Je ne suis pour rien dans la délibération ni dans la rédaction de la lettre adressée par les syndicats ouvriers à M. le maire lors de la fête du 14 juillet. Le soir que cette délibération a été prise, l'on est venu chez moi me la faire signer, chose que j'ai faite sans y attacher d'importance, ne l'ayant pas lue...»
Si je l'avais lue, je ne l'aurais pas signée, car à Saint-Nazaire je suis assez connu pour mes idées franchement républicaines, et j'ai toujours respecté la mémoire de ce que nos aïeux ont fait pour la liberté. »
Voilà qui est bien parlé et sagement pensé. Nous ne savons pas quelle est la nuance politique du secrétaire de la Bourse du travail de Saint-Nazaire. Il est bien probable qu'il n'a pas nos opinions sur l'organisation actuelle de la société. Mais il semble comprendre que l'on ne peut sérieusement associer des revendications démocratiques à une sorte d'anathème contre le 14 Juillet et la Révolution de 1789. On n'est pas un républicain, il le reconnaît, quand, sous prétexte de socialisme, on tombe dans le piège grossier des monarchistes, qui veulent faire croire aux ouvriers que l'ancien régime fut l'âge d'or pour les travailleurs. On n'est pas un républicain quand on renie l'œuvre de 1789, si imparfaite ou si incomplète soit-elle.
La Commission du Conseil municipal chargée de confectionner le programme de la fête nouvelle du 22 septembre a voulu sortir de la banalité des lampions et des oriflammes et a résolu d'organiser deux cortèges historiques personnifiant , l'un la Marseillaise, et l'autre le Chant du départ. Ce sont deux anachronismes, dit la Liberté.
En 1792, le chant à la mode était le Ça ira populaire :
Ah ! ça ira, ça ira, ça ira,
Les aristocrates on les pendra.
Quant au Chant du départ, il fut versifié par Joseph Chénier et orchestré par Méhul en 1794.
On voit que la municipalité parisienne est mal renseignée par ses historiographes.
4 septembre 1892
choléra
Le Conseil municipal de Cherbourg, étant donnés les cas de choléra constatés aux Etats- Unis, demande que le service des paquebots de la Compagnie transatlantique soit reporté au Havre ou à Saint-Nazaire, ce dernier port ayant l'avantage de posséder un lazaret
8 septembre 1892
choléra
Le steamer allemand Albingia, venant de Hambourg, dont on a annoncé hier l'arrivée au Havre, n'a pas été admis à entrer dans les bassins, n avait quelques cas suspects à bord. En conséquence, le service sanitaire a fait transmettre l'ordre au steamer de quitter immédiatement la rade et de se rendre à Saint-Nazaire, où il existe un lazaret. Un remorqueur s'est rendu dans la soirée auprès du navire hambourgeois, afin de lui apporter des médicaments et une provision d'eau potable.
14 septembre 1892
choléra
Disons à ce propos, que la Compagnie Transatlantique n'a pas eu à constater un seul cas de choléra sur tous ses paquebots, grâce aux mesures préventives qui ont été appliquées immédiatement.
Le service du Havre à New-York a été transféré provisoirement à Cherbourg.
Les lignes Havre-Bordeaux-Colon, Havre Bordeaux-Haïti ont jusqu'à nouvel ordre leur point de départ à Saint-Nazaire au lieu du Havre.
Le transport des émigrants a été suspendu.
Des étuves de désinfection ont été installées presque sur tous les paquebots et les pharmacies complétées par tous les médicaments nécessaires.
Il résulte de toutes ces précautions que les paquebots Transatlantiques ne subissent pas de quarantaine à New-York, à la grande satisfaction de tous les passagers.
26 septembre 1892
CONGRES OUVRIERS SOCIALISTE REVOLUTIONNAIRE
Briand, délégué de Saint-Nazaire, demande que la question de la grève générale soit inscrite au programme du Congrès.- Une discussion assez vive s'engage, au cours de laquelle M. Thivrier échange des propos aigres avec MM. Ferroul et Cadenat, adjoint au maire de Marseille;
19 novembre 1892
ANARCHISTE
Saint-Nazaire. Le compagnon Borda. a été arrêté hier à Nantes, sous l'inculpation d'excitation au meurtre et au pillage dans une réunion tenue à Trignac le 22 octobre, et pour menaces écrites contre M. Andrade, directeur des Chantiers de la Compagnie transatlantique, et M. Pelloutier, directeur de la Démocratie de l'Ouest.
24 novembre 1892
ANARCHISTE
Saint-Nazaire. L'anarchiste Borda, dont nous avons annoncé l'arrestation, a été condamné hier à six mois de prison, par le tribunal correctionnel de Nantes. Il déclare se soumettre momentanément à ce verdict, mais ajoute que cette condamnation lui dictera sa conduite future.