
1894
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23 mars 1894
Naufrage alaska
On craint de ne pouvoir renflouer le steamer anglais Alaska coulé à l'entrée de Saint-Nazaire, en arrivant de Cardiff, avec du charbon.
14 avril 1894
LA GRÈVE DE TRIGNAC -DÉPUTÉ ARRÊTE
Salat-Nazaire, 12 avril. Aujourd'hui à midi, à Trignac, à la sortie d'une conférence dans laquelle il avait conjuré les femmes des grévistes d'empêcher leurs maris de reprendre le travail, le député socialiste du XI' arrondissement de Paris, M. Toussaint, a été arrêté pour outrages à la gendarmerie, On a arrêté en même temps les grévistes Bauthamy, Lecomte et Robert, la fille Moyon et la femme Pétillon.
M. Toussaint a été mis en liberté provisoire. Les cinq autres ont été condamnés Bauthamy à 30 jours de prison, Lecomte et Robert à huit jours, la femme Pétillon et la fille Moyon à 4 jours.
L'effervescence est grande.
15 avril 1894
LA GRÈVE DE TRIGNAC - FAIBLESSE COUPABLE
M. Toussaint, député socialiste de Paris, s'était rendu à Trignac pour empêcher l'accord entre les ouvriers grévistes et les patrons, accord qui sans lui se serait fait.
Comme les femmes engageaient leurs maris à reprendre le travail, il est intervenu en insultant les gendarmes.
Les gendarmes ont arrêté cet énergumène avec cinq autres grévistes.
Le Parquet de Saint-Nazaire a cru devoir poursuivre les cinq petits et relâcher le gros. Le journal le Siècle demande la révocation du procureur de la République, coupable d'une pareille faiblesse. Il a cent fois raison.
Un ancien MAGISTRAT.
15 avril 1894
LA GRÈVE DE TRIGNAC - troubles de Trignac
Depuis la mise en liberté du député Toussaint, une grande effervescence règne à Trignac où le travail allait être repris.
Les députés Sembat, Contant, Grotissier sont venus à la rescousse. Ils ont organisé hier, à la Salle de la Jeunesse, une réunion orageuse dans laquelle ils ont poussé à l'insurrection. On se demande si les députés socialistes vont recommencer à travers la France les tournées révolutionnaires qui ont fait toute la popularité de Baudin et de Thivrier.
MM. Jaurès, Millerand et Viviani sont arrivés se matin.
Il est probable qu'une interpellation sera déposée à la rentrée sur ces faits.
Saint-Nazaire, 14 avril. La situation à Trignac est toujours tendue. Le député Toussaint est parti pour la Corrèze. L'anarchiste Guillernin a été condamné à 3 mois de prison pour outrages aux gendarmes.
18 avril 1894
LA GRÈVE DE TRIGNAC
On a arrêté hier Gegout et Busson, pour entraves à la liberté du travail et outrages aux gendarmes. Ils ont passé dans l'après-midi en correctionnelle et ont été condamnés le premier à 3 mois de prison, le second à 1 mois.
La reprise du travail est considérée comme certaine. Il y a toujours à Saint-Nazaire les députés Coûtant et Groussier. MM. Dejeante et Fabérot y arriveront sus doute aujourd'hui.
Abraham, ancien candidat socialiste aux élections, arrêté il y a quelques jours, sera défendu par Millerand.
18 avril 1894
naufrage
Dimanche, vers 5 heures, quatre jeunes gens se promenaient en canot dans le bassin de Penhouët (Saint-Nazaire), lorsque par suite d'une fausse manœuvra le canot chavira, entraînant avec lui dans les flots Victor Broussard, 24 ans. Le cadavre n’a toujours pas été retrouvé.
Le dundee Marcof s'est échoué sur le banc de Morées, en face de Villes-Martin. Le navire est perdu. L'équipage s'est sauvé avec le canot du bord.
18 avril 1894
LA GRÈVE DE TRIGNAC
Hier soir a eu lieu, à Saint-Nazaire, une réunion publique, salle de la Jeunesse. Les orateurs ont vivement attaqué le gouvernement, la presse et surtout M. Gasnier, député, maire de Saint-Nazaire.
Une autre réunion a eu lieu, dans l'après-midi, à Trigrnac, composée exclusivement de femmes auxquelles les députés Dejeante et Fabérot ont fait une conférence.
Il y a eu, hier, de nouveau quelques rentrées. Tout est calme.
La direction de la fonderie a fait, placarder un avis Annonçant que si les dernières propositions ne sont pas acceptées, l'usine sera irrévocablement fermée.
25 avril 1894
LA GRÈVE DE TRIGNAC
Le procureur de la République de Saint- Nazaire est mis d'office à la retraite, pour son inqualifiable faiblesse à l'égard du député socialiste Toussaint.
Le garde des sceaux a soumis à la signature du président de la République, un mouvement judiciaire. M. Marion de Procé, procureur de la République à Saint-Nazaire, est mis à la retraite. (Cette mesure disciplinaire est motivée par la complaisance singulière de M. de Procé à l'égard de M. Toussaint, député socialiste, lors de l'affaire de Trignac.)
Il est remplacé par M Rollet.
26 avril 1894
La grève des Forges de Trignac
A quelques kilomètres du Croisic, de Pouliguen, de Pornichet, s'étend une vaste plaine tourbeuse de quinze mille hectares environ, connue dans ce pays sous le nom de La Brière. C'est à l'extrémité de ce véritable désert, à deux lieues de Saint-Nazaire, que furent construites, il y a une quinzaine d'années, les Forges de Trignac. L'idée qui présidait à cette entreprise était juste d'une part, la proximité d'importantes mines de fer, l'extrême facilité de faire venir par mer les minerais espagnols et les houilles de toutes provenances d'autre part, la presque certitude d'écouler les produits fabriqués, tant dans les vastes chantiers de constructions maritimes de Nantes, Saint-Nazaire que dans les usines de toute la Bretagne, la Vendée, les Charentes, enfin dans toute une contrée agricole et industrielle, presque totalement dépourvue de grosses forges. On installa donc de hauts fourneaux pour fabriquer la fonte, une aciérie Bessemer, des trains de laminoirs pour fabriquer la tôle et les barres marchandes, et enfin un atelier de puddlage afin de préparer le fer brut.
L'usine, dès sa fondation, occupait une étendue de 40 hectares et employait dans ses ateliers jusqu'à 12 et 1,5OO ouvriers. Malheureusement le succès ne répondit point aux espérances de la Société anonyme des Forges de Saint-Nazaire, pour des causes que nous n'avons pas à rechercher ici en raison des difficultés qu'elle eut à fonder une usine sur le sol tourbeux de La Brière, de nombreux millions furent dépensés avant même qu'aucun atelier ne fût ouvert. Le travail commença sous de mauvais auspices, le personnel mal recruté et les salaires mal réglés, la Société ne put satisfaire la foule des créanciers et une liquidation fut nécessaire.
C'est alors que la Société actuelle, dite des Forges et Aciéries de Trignac, se rendit propriétaire de l'usine et du matériel de l'ancienne société, séduite par les avantages dont nous avons parlé plus haut. ̃̃
Cette Société se mit courageusement à l'œuvre c'était environ il y a trois ans; le personnel d'ingénieurs de l'usine fut entièrement réorganisé, et un contrôle sérieux des opérations techniques fut constitué à Paris; bientôt on eut l'absolue certitude que l'affaire des Forges et Aciéries de Trignac serait florissante.
La nouvelle Société parvint petit à petit à s'affranchir des charges dont elle avait hérité, et on put prévoir que chacun des ateliers donnerait bientôt entière satisfaction.
Seule, la fabrication des fers bruts était toujours en perte, et cela de telle manière que la Société luttait avec peine dans son propre pays contre ses concurrents étrangers, ou ayant leur centre de fabrication dans le nord de la France. Les frais de façon, notamment des fers puddlés, excédaient de plus de 25% les frais analogues pour les usines du Nord et de l'Est. Il fallait à tout prix les réduire, ce qui permettait d'étendre considérablement la vente des fers et d'évincer la concurrence étrangère ou bien fermer cet atelier. La direction décida donc de réduire de 20% les frais de façon du puddlage des fers. (On est loin, comme on le voit, des 50 à 60% dont se sont plu à parler certains journaux.) Mais il convient de dire que chaque ouvrier, par suite de la diminution du tarif, n'était nullement frappé d'une diminution de 20% sur son propre salaire l'abaissement de 20% dans les frais de façon dont nous venons de parler provient surtout d'une meilleure répartition du personnel tendant à augmenter la capacité productive de l'individu. En réalité, sous le nouveau tarif comme sous l'ancien, la Société compte employer le même nombre d'ouvriers (une trentaine environ) dans l'atelier de puddlage la tonne de produits fabriqués sera sans doute moins chère, mais en raison de l'extension des cora mandes que l'abaissement de la main-d'œuvre procurera, les ouvriers, ayant plus de travailleront plus payés à la fin de chaque quinzaine. En 1893, le puddlage ne fonctionnait guère que dix jours par mois avec le nouveau tarif, il est presque certain que les ouvriers employés à cet atelier travailleront une moyenne de vingt jours sur trente. Le nouveau tarif fut porté à la connaissance des ouvriers à la fin du mois de mars 1894: ceux-ci ne virent qu'une diminution immédiate de leur salaire et protestèrent sans songer à l'augmentation des gains mensuels que cette décision serait à brève échéance à même de leur procurer.
Ces trente ouvriers recoururent à. la chambre syndicale de Trignac. Cette chambre réunit en meeting ses adhérents, au nombre de 250, qui décidèrent de mettre en demeure la Société de reprendre les ouvriers puddleurs au tarif ancien, en la menaçant d'une grève générale dans le cas où elle n'obtempérerait pas à cette injonction.
La Société refusa et déclara l'atelier de puddlage fermé. Quelques jours après, les puddleurs et les 250 adhérents de la chambre syndicale déclarèrent la grève ouverte et intimidèrent assez les ouvriers étrangers à la chambre pour les empêcher de reprendre leur travail.
L'usine une fois fermée, les réunions devinrent quotidiennes, sous la direction du syndicat et de la Bourse du travail de Saint-Nazaire, ayant à sa tête le citoyen Abraham, traiteur et conseiller municipal, qui se multiplie, monté sur une superbe bicyclette, à travers les groupes d'ouvriers, et les excite à la résistance, tout en les conviant à de longues stations en son cabaret.
La question change alors de face; il n'est presque plus question des trente ouvriers puddleurs, les grévistes de Trignac déclarent au directeur de l'usine qu'ils veulent une augmentation générale de 10% sur leur salaire, qu'ils veulent être payés à l'œuvre et non plus au marchandage, et naturellement qu'ils exigent le renvoi de certains employés de l'usine, qui décidément out cessé de leur plaire. La Société maintient ses conditions antérieures. Peu de temps après, une détente se produit, les ouvriers se décident à ne plus vouloir exiger que les conditions suivantes le maintien des puddleurs pendant trois semaines dans leur atelier ou utilisés pour un travail quelconque dans l'usine un changement dans l'époque de la paye, et la main-d'œuvre des manœuvres à raison de 35 centimes l'heure au lieu de 28.
La Société décida qu'on accorderait 31 centimes aux manœuvres, que les ouvriers puddleurs seront gardés trois semaines à l'usine, et enfin la question de la paye fut tranchée en faveur des requérants.
C'est vers la fin de ces pourparlers .que certains députés de Paris commencèrent à s'occuper activement des affaires de Trignac, grâce, comme l'a dit M. de Cassagnac, à l'extrême facilité qu'ont ces messieurs de voyager sans bourse délier.
Leur premier soin en arrivant à Trignac fut de réunir les femmes qui jusqu'alors avaient engagé leurs maris, leurs pères et leurs frères à reprendre le travail après quelques discours elles devinrent plus acharnées que les hommes.
On fit meetings sur meetings, les pourparlers furent abandonnés, les événements que l'on sait se passèrent, désordres dans les rues, arrestations, menaces, etc., etc., et grâce au beau zèle de messieurs les meneurs, voilà aujourd'hui près d'un mois que 1,200 hommes refusent de reprendre l'ouvrage et que, grâce aux subsides que les chambres syndicales leur font parvenir, ils passent leurs journées à discuter au cabaret; au lieu de gagner la malheureuse existence de leurs femmes et de leurs enfants.
9 mai 1894
saumon
Saint-Nazaire. La pêche du saumon dans la Loire a produit 6,188 kilo. de salmonidés, qui, vendus à raison de 5 fr. à 5 fr. 24 le kilo, ont rapporté 32,048 francs.
11 mai 1894
Grève de Trignac- Le cabaretier Abraham
Nous avons annoncé que les députés socialistes avaient envoyé cinq des leurs à Trignac pour fomenter la grève et prêter leur concours au cabaretier Abraham, l'un des principaux meneurs. Abraham, dont le nom hébraïque semble trahir l'origine, est âgé d'une trentaine d'années.
Ouvrier mécanicien assez habile, il eût bientôt des visées politiques et fit des conférences à ses compagnons chez les marchands de vin. Sa propagande lui valut d'être élu conseiller municipal socialiste. Dès ce moment, il devint dans le pays un personnage important.
Il fut l'instigateur de la grève des débardeurs de Saint-Nazaire en 1893 et fut chargé de défendre les intérêts des ouvriers auprès des patrons. Il les défendit assez mal puisqu'il n'obtint aucune augmentation. Par contre, il persuada aux ouvriers qu'ils n'étaient pas assez malins pour vérifier leurs comptes eux-mêmes et il se chargea de ce soin, moyennant la modique rétribution de cinq sous par homme et par navire. Les ouvriers qui refuseront de payer cet impôt non prévu par la Commission du budget furent dénoncés au Syndicat comme des faux-frères.
Ces règlements de compte ne lui procuraient pas encore assez de bénéfices et il s'installa, cabaretier à l'enseigne la Solidarité.
Les ouvriers furent invités à solidariser leur bourse avec celle du cabaretier socialiste en venant prendre chez lui leurs consommations. En outre, Abraham, qui est un homme de ressources, Imagina de joindre aux consommations des consultations gratuites, que paraît-il il faisait payer un franc. Espérons qu’en homme pratique il exigera une redevance des députés socialistes qui sont allés à Trignac, pour faire de la réclame.
Puisque les simples socialistes payent l'impôt qu'il prélève sur leur crédulité, il faut que l'état-major socialiste débourse à son tour. Ce sera un moyen de mettre à exécution le fameux principe de l'impôt égal pour tous.
11 mai 1894
Grève de Trignac
Saint-Nazaire. La direction de Trignac a offert, hier, par huissier, les payes refusées par les grévistes qui, sur un nouveau refus, seront considérés comme démissionnaires, puis remplacés.
Dans la soirée, des réunions ont été organisées à Trignac et à Saint-Nazaire. Les députés socialistes y ont pris parole.
M. Millerand a qualifié de criminelles les poursuites contre M. Toussaint, organisées par la majorité qui obéit à la férule gouvernementale, et il s'est attaché à démontrer que le parti socialiste trouverait une force nouvelle dans les persécutions gouvernementales.
Après lui, MM. Marcel Sembat, Vaillant, Baudin et Toussaint ont pris successivement la parole et prononcé de ̃violents discours. M. Thivrier est attendu demain.
On comptait aujourd'hui 158 rentrées, qui font avec les contremaîtres 200 travailleurs.
12 mai 1894
Grève de Trignac
Les députés socialistes ont décidé d'établir une permanence de cinq ou six des leurs à Trignac, afin de perpétuer la grève. Il est vrai que celle-ci plonge dans la misère un grand nombre de familles d'ouvriers et menace d'amener la disparition d'une industrie qui faisait vivre un grand nombre de gens du pays.
Mais qu'importent toutes ces souffrances aux députés socialistes La grève de Trignac leur fournit une réclame électorale; ils l'exploiteront jusqu'au bout. Le député Toussaint, interviewé, a raconté qu'il ne craignait pas la prison.
— Le gendarme qui m'a arrêté, dit-il, était ivre. Pour s'en convaincre, Il n'y avait qu'à voir son nez.
Il annonce que ses collègues socialistes iraient combattre M. Goirand dans sa circonscription et l'empêcheraient d'être réélu.
Saint-Nazaire, 10 mai. Hier soir, des réunions ont été organisées à Trignac et à Saint-Nazaire. Les députés socialistes y ont parlé.
M. Millerand a qualifié de « criminelles » les poursuites contre Toussaint. Il a ajouté que M. Casimir-Périer « aurait son tour », que « les opprimés le chasseront du Palais Bourbon ».
Puis il a fait l'éloge du socialisme. « L'idée socialiste, une fois entrée dans la tête des Bretons n'en sortira plus, »
M. Baudin a dit que le drapeau rouge remplacera le drapeau tricolore de la canaille bourgeoise.
12 mai 1894
Grève de Trignac
Grève de Triguac
11 mai. Les députés arrivés à Trignac à la suite du vote autorisant les poursuites contre M. Toussaint ont été assez froidement reçus; aussi ne sont-ils pas restés longtemps et ont-ils retournés à Paris.
En revanche, le citoyen Thivrier est arrivé hier soir et a été très fêté. II a fait ce matin une conférence pour les femmes.
Elles étaient au nombre de 250 environ. Il les a vivement engagées à persévérer et à faire persister leurs maris dans leurs revendications.
Le citoyen Poulain, secrétaire de la Fédération du syndicat, dans un discours violent,^ renchéri encore sur celui du citoyen Thivrier.
Le nombre des ouvriers qui travaillent est à peu près le même i 160 environ, et il y a lieu de croire qu'un arrangement définitif va intervenir
M. Gasnier, député, maire de Saint-Nazaire, est arrivé ici hier soir. Des pourparlers sont engagés entre lui, le sous-préfet, le maire de Montoire et M. Lamarche, directeur des forges.
Ce soir, à dix heures, le député M. Thivrier a parlé dans une réunion très calme, puis il est reparti pour le Cher.
17 mai 1894
Grève de Trignac
Grève de Triguac
Saint-Nazaire. Il y a eu ce matin à Trignac 156 rentrées. Les ressources des grévistes s'épuisent et l'on doute qu'ils puisent tenir encore longtemps.
La Compagnie renonce définitivement au puddlage. Les puddleurs devront quitter d'ici deux jours les logements qui leur étaient loues par la Compagnie.
Le citoyen Abraham dont le Figaro racontait ces jours-ci l'édifiante histoire, a comparu aujourd'hui devant le Tribunal correctionnel de Saint-Nazaire, sous l'inculpation d’atteintes à la liberté du travail avec menaces. Il a eu deux mois de prison.
18 mai 1894
Greve de trignac
Les pourparlers ont été rompus hier.
La Compagnie a décidé de n'accorder que l'ancien tarif aux ouv.iers qui voudront reprendre le travail et d'expulser les puddleurs seuls des logements qu'elle loue aux ouvriers.
La Compagnie renonce au puddlage. Pour les autres ouvriers qu'elle loge, elle attendra une solution. La1 résistance des grévistes ne peut durer longtemps; ils sont sans ressources, et la misère est grande à Trignac.
Le citoyen Abraham, conseiller municipal socialiste, ancien candidat à la députation, qui fut arrêté à Trignac pour atteinte à la liberté du travail avec menaces, a comparu hier devant le tribunal correctionnel de Saint-Nazaire.
Il était défendu par M. Viviani. Le député Baudin était aussi au banc de la défense.
Les témoins ont été affirmatifs sur les faits reprochés, et Abraham a été condamné à 2 mois de prison.
20 mai 1894
Grève de Trignac
Fin de la Greve de Triguac
Saint-Nazaire. La grève de Trignac est terminée.
Le travail reprendra lundi prochain aux conditions proposées par la Compagnie paie tous les deux samedis, manœuvres payés au minimum de 31 centimes reprise intégrale de tous les ouvriers dans une douzaine de jours, sauf les puddleurs, dont l'atelier est supprimé.
27 mai 1894
Empoisonnés par la ciguë.
Neuf enfants de Penhouët, près de Saint-Nazaire se sont empoissonnés hier matin avec une plante du genre ciguë. L'un d'eux. Pierre-Marie Botrel, 2 ans, est mort; deux sont grièvement malades, ce sont Marguerite Botrel et Marie Jacol, âgée de 1l ans.
Les six autres sont plus ou moins malades. C'est en jouant dans une prairie qu'ils mangèrent de cette plante qu'ils prirent pour de la bernotte, racine bonne à manger.
7 juin 1894
Edmond Toussaint
(16 juillet 1849, Lunéville - 26 février 1931, Paris), est un homme politique français.
L'affaire du député Toussaint est venue aujourd'hui au Tribunal correctionnel de Saint-Nazaire, M. Toussaint a été condamné à dix jours de prison et 100 fr. d’amende.
8 juin 1894
Edmond Toussaint
(16 juillet 1849, Lunéville - 26 février 1931, Paris), est un homme politique français.
TRIBUNAL Correctionnel de Saint-Nazaire
Le député Toussaint compte rendu de l'audience.
Un télégramme de notre correspondant de Saint-Nazaire nous a annoncé, hier, à la dernière heure, la condamnation du député socialiste Toussaint, poursuivi pour avoir outragé les gendarmes pendant la dernière grève- de Trignac.
Il n'est pas sans intérêt de revenir, en quelques mots, sur l'audience qui s'est terminée fort tard.
M. Toussaint, qui s'est défendu lui-même, était arrivé dans la matinée à Saint-Nazaire, accompagné de son collègue, M. Faberot, député socialiste de la Seine.
La prévention était soutenue par M. Lelepvrier, le nouveau procureur de la République de Saint-Nazaire son prédécesseur, M. Marion de Procé, mis d'office à la retraite pour avoir négligé de poursuivre M. Toussaint, en état de flagrant délit, suivait en curieux les débats.
Le Tribunal reçoit d'abord les dépositions des trois gendarmes Juvin, Chauveau et Bauthamy, qui se trouvaient de service, le 12 avril dernier, à la réunion des grévistes de Trignac, et qui précisent les paroles injurieuses reprochées à M. Toussaint.
A la sortie de la réunion, au moment où ces trois gendarmes essayaient, non sans-peine, de faire entendre raison à un groupe de femmes qui refusaient de circuler, le député de la Seine, s'adressant aux manifestantes, s'écria
— Circulez, mesdames, n'écoutez pas les insolences de la gendarmerie !
— Les gendarmes ne disent pas la vérité, voilà tout, réplique M. Toussaint à chacune de ces trois dépositions.
Un témoin à décharge, M. Lebrun, pâtissier, secrétaire de la Bourse du travail à Saint-Nazaire, déclare en effet que le « citoyen » Toussaint n'a point parlé de l'insolence de la gendarmerie et qu'il s'est borné à dire, textuellement:
—Circulez, mesdames, évitez les provocations.
Puis se tournant vers les gendarmes, M. Toussaint avait ajouté en termes non moins convenablos
— C'est à des femmes que vous ayez, affaire, messieurs, ayez plus d'égards.
C'est à ce moment, déclare un second témoin à décharge, M. Toulevé, modeleur, qu'un gendarme qui avait mai entendu, s'avança vers M.Toussaint en lui disant
— Je vous arrête, parce que vous nous avez traités d'insolents !
M. Toussaint, interrogé par le président sur les causes de sa présence à Trignac, répond qu'il s'y était rendu uniquement pour prêcher la conciliation et recommander le calme aux ouvriers
— En revanche, ajoute-t-il, les gendarmes se sont montrés des plus violents, surtout le gendarme Juvin, qui a fait preuve de beaucoup de brutalité à l'égard des femmes et qui, s'adressant à moi, s'est écrié
— Vous êtes député? Je m'en moque
— Au surplus, les gendarmes avaient reçu l'ordre de me suivre pas à pas et d'écouter toutes mes paroles.
M. le président Bouhier.
— Vous étiez parfaitement dans votre droit en apportant aux ouvriers les conseils de votre expérience. Mais vous aviez le devoir, vous député, plus qu'aucun autre, de ne point outrager ceux qui sont chargés de faire respecter la loi.
M. le procureur de la République Lelepvrier rappelle, dans son réquisitoire, le grand principe de l'égalité de tous les prévenus devant la loi, et demande au Tribunal de frapper M. Toussaint « sans exagération, mais sa faiblesse ». Dans une défense très modérée, le député de la Seine maintient son récit, affirmant qu'il n'a adressé aucune parole blessante aux gendarmes, et que les dépositions qui l'accusent sont le résultat d'un mot d'ordre
Ma parole, dit-il en terminant, est aussi honnête que celle de n'importe qui. C'est tout ça que j'ai à ajouter pour ma défense. »
Après une courte délibération, le Tribunal rapporte un jugement dont voici le texte
Attendu qu'il résulte des rapports de gendarmerie dressés par Juvin, Chauveau et Bauthamy que Toussaint a tenu, à Trignac, le 12 avril dernier, en s'adressant aux femmes qui sortaient d'une réunion gréviste, les paroles suivantes « N'écoutez pas les insolences des gendarmes ! »
Que ces propos constituent un outrage envers les représentants de la force armée; qu'ils ont été prononcés de façon à être entendus de tous; qu'ils ont porté atteinte à l'autorité des modestes agents chargés de faire respecter la liberté du travail qu'ils constituent un délit;
Considérant que les témoignages de la gendarmerie font foi jusqu'à preuve du contraire; que la contre-enquête effectuée n'a pas été favorable à M. Toussaint;
Condamne Toussaint à dix jours d'emprisonnement, à 100 francs d'amende et aux frais du procès.
Le député socialiste, qui paraît enchanté de ce résultat, se lève et va serrer la main de M. Marion de Procé, l'ancien procureur de la République, auquel il dit d'un air radieux
Je suis ravi! Cette condamnation-là, c'est 2,000 voix de plus aux élections prochaines.
Vive Toussaint ! crie une voix dans l'auditoire.
Albert Bataille,
14 juin 1894
LES GRÈVES A Trignac
Les nouvelles menaces de cessation du travail à Trignac sont heureusement et définitivement enrayées. Le directeur de la Compagnie et les délégués ouvriers, dans une entrevue à laquelle assistaient le sous-préfet de Saint-Nazaire et le maire de Montoir, se sont mis absolument d'accord sur l'application du traité intervenu le 19 mai.
Les douloureux événements des mois derniers sont donc bien décidément clos.
27 juin 1894
NOS CHANTIERS
Les chantiers de la Loire, de Saint-Nazaire, viennent de recevoir, dit La Démocratie, la commande d'un nouveau grand croiseur japonais de 114 mitres.
Les Lockroy et autres marins d'eau douce, qui semblent avoir voulu, par une récente campagne, inspirer aux Français eux-mêmes la défiance vis-à-vis de nos bâtiments et de leurs constructeurs, doivent trouver que le Japon est bien mal inspiré.
25 juillet 1894
manœuvre DÉFENSE DE L'EMBOUCHURE DE LA LQIRE
8 torpilleurs sont arrivés à Saint-Nazaire où ils viennent d'être rejoints par le croiseur en bois Fabert, qui est surtout monté par des réservistes. Cette escadrille va tenter l'attaque et la défense de l'entrée de la Loire.
12 octobre 1894
LES DENONCIATEURS
Le Courrier de Saint-Nazaire raconte une histoire qui montre à quelles avanies un honnête homme, en butte à des haines quelconques, peut se voir exposé, avec la dernière loi sur les menées anarchistes.
M. Pierre David, 32 ans, est un brave et honnête garçon, jardinier de Mme Le Tilly, à Assérac (Loire-Inférieure), très estimé dans le pays, et n'ayant jamais eu le moindre rapport avec la police. Or, le 15 juillet dernier, il se trouvait dans une auberge du bourg avec son frère et son cousin; la conversation tomba sur les jardiniers en général, et, en particulier, sur l'un d'eux qui était mort.
— On le remplacera bien, dit Pierre David sans penser à mal, on a bien remplacé Carnot qui vient d'être assassiné.
— D'ailleurs, ajouta-t-il, je ne voudrais point être président de la République, le même coup pourrait m'arriver.
Ces propos furent relevés, dit notre confrère, par deux instituteurs présents qui s'empressèrent de dénoncer l'auteur d'un discours aussi incendiaire. Après quoi, enquête de la gendarmerie sur les habitudes, les fréquentations, les lectures du coupable pour un peu, on se fût enquis des légumes qu'il cultivait de préférence.
Malgré les excellents renseignements recueillis sur son compte, David dut comparaître devant le juge d'instruction de Saint-Nazaire, qui n'eut pas de peine à s'assurer de sa parfaite innocence, et s'empressa de le rendre à ses occupations.
Espérons que ce magistrat complètera son acte de justice en faisant connaître officiellement à M. Pierre David le nom de ses accusateurs, afin que celui-ci, à son tour, puisse les poursuivre devant les tribunaux et faire infligera ces mouchards, aussi inintelligents que méchants, la sévère leçon qu'ils méritent.
14 novembre 1894
Tempête dans les départements
Région de Nantes Trois accidents mortels, Navire jeté sur la côte
Jamais Nantes n'a vu pareille tempête. Cheminées et toits sont tombés. Il y a eu de nombreux accidents.
Sur le quai du Port, Boiteux, 36 ans, a reçu une cheminée sur la tête et a eu le crâne enfoncé; Il est mort presque aussitôt.
Un garde du ponton a été enlevé par le vent et s'est noyé; un marin a péri en allant à son secours.
Les dégâts sont très considérables. Les trains à destination de Saint-Nazaire ne marchent que péniblement, traînés par deux locomotives. On craint beaucoup d'accidents.
A Saint-Nazaire, les dégâts sont épouvantables.
Un brick-goélette a été jeté à la côte. A Méans, la chaussée du Jardin-des-Entrepôts a été détruite par la mer démontée.
Les bassins débordent, inondant les quais.
Un canot et une drague ont été coupés en deux.
Les magasins ont fermé leurs devantures, par crainte de désastres celles du café de l'Univers, dans la Grande-Rue, a été brisée; les vagues déferlent, battant les maisons.
L'état de la mer est impossible à décrire.
Région de Rouen.
Cinq maisons détruites La bourrasque a causé des dégâts à Rouen et dans les environs. On assure que 5 maisons ont été détruites à Monville par l'ouragan.
Région du Havre, Inondations
La mer est complètement démontée. Des imprudents, qui avaient traversé la jetée ont été obligés d'attendre la marée basse pour retourner. Des inondations se sont produites dans le quartier Saint-François, on craint des sinistres maritimes.
Sur les côtes bretonnes
A Saint-Malo aucun bâtiment n'a pu sortir un petit bateau de pêche a sombré à la côte de Dinan, pas d'accidents de personnes.
A Brest, la rade a dû être consignée.
A Saint-Etienne, des accidents se sont produits sur plusieurs points. Le mur d'une teinturerie, incendiée récemment, s'est abattu sur une femme, blessée grièvement. Plusieurs toitures ont été fortement endommagées.
A Brest, pendant toute la journée, il a été très difficile de circuler dans les rues les ardoises jonchaient le sol. Au cours d'Ajot, des arbres ont été brisés.
De nombreux magasins ont été obligés de fermer leurs devantures.
Au sémaphore de Créachmeur, la boule du sémaphore s'est détachée et a effondré le toit du poste sémaphorique. II n'y a pas eu d'accident de personne.
Région de Béthune
L'inondation causée par la tempête d'hier dans l'arrondissement de Béthune a causé environ à 200 000 francs de dégâts.
Le canton le plus éprouvé est celui de Lillers, puis viennent ceux de Laventie, Norrent, Fontes et Béthune.
Les autres cantons ont peu souffert.